L'endométriose : Quand le ventre fait mal
Cet article a été publié dans la Revue Plantes Médicinales
Par Sarah-Maria LeBlanc, HTA spécialisée en santé des femmes
Quand le ventre fait mal…
Dans plusieurs traditions ancestrales, on parle de notre utérus comme le siège de notre pouvoir féminin. Ainsi, la période des menstruations a été considérée pendant longtemps par bien des peuples autour du monde, comme un moment béni et magique. Dans les communautés autochtones du Plateau Nord-Ouest du Pacifique (et la plupart des communauté autochtones, nous diraient les grands-mères), une anthropologue a pu observer et documenter les loges de femmes, un moment rituel important de transmission de la culture féminine, des grands-mères aux mères aux jeunes filles. Malheureusement, en raison selon moi de l’idéologie patriarcale, notre précieux fluide a perdu ses lettres de noblesse et est considéré par plusieurs peuples- et même en Occident, comme un liquide impur. Il contient pourtant tous les nutriments nécessaires pour nourrir un possible bébé… existe-il quelque chose de plus pur sur la Terre ?
Mais lorsque le ventre fait mal, lorsque l’utérus se crampe, que chaque menstruation qui revient est annonciatrice de douleurs, de nausées, de débalancements digestifs, il peut être très difficile de concevoir la nature sacrée de notre utérus, de notre sang, de nos règles. Combien de clientes m’ont dit en dix ans, qu’elles ont pris des anovulants alors qu’elles n’en souhaitaient pas, comme traitement pour calmer ces horribles douleurs qui les empêchaient de vivre ? On commence à peine à réaliser et admettre publiquement l’influence de pathologies telles que les fibromes et l’endométriose sur les menstruations. En effet, même s’il existe une multitude de facteurs (inflammation systémique, carences en AGE et/ou en magnésium, intolérances, faiblesse circulatoire, stress et anxiété chronique…), on sait maintenant que l’endométriose est la principale cause de dysménorrhée. Le problème c’est qu’il est difficile de la voir avec l’échographie, ce qui nécessite souvent l’usage de l’IRM, plus coûteux, moins accessible.
Comment faire pour traiter l’endométriose de façon naturelle ? Existe-t-il des alternatives aux hormones de synthèse et à la chirurgie ?
S’il peut être long et difficile de faire disparaître complètement les tissus ou kystes endométriosiques de façon naturelle et non-invasive, il s’avère relativement aisé de les réduire en taille et d’éliminer les symptômes qui y sont associés, tels que la douleur et les troubles digestifs. Nous verrons dans les cas qui suivent le processus et l’impact des plantes médicinales sur leurs crampes menstruelles.
Helena
Helena, 31 ans, d’origine afro-américaine, vient me voir pour des menstruations douloureuses. Elle veut arrêter les contraceptifs dans un mois, qu’elle prend depuis l’adolescence pour des règles extrêmement souffrantes, qui lui faisaient manquer l’école. Elle porte présentement un anneau hormonal. Quand je la questionne sur le pourquoi veut elle arrêter, elle répond qu’elle n’a pas de conjoint, qu’elle veut apprendre à écouter son corps et qu’elle a peur des effets secondaires des hormones de synthèse à long terme. Elle a cependant peur de la douleur, de la durée possible de ses menstruations et de saignements hémorragiques. Son sommeil est irrégulier et insuffisant, elle vit beaucoup de stress. Je voudrais lui donner une décoction d’adaptogènes, mais elle part bientôt en voyage. En attendant elle vit à un rythme effréné : que ce que je lui donne doit être facile à prendre. Nous décidons ensemble de commencer doucement, en attendant le retrait de l’implant :
- Teinture Framboisier : Pour tonifier et détendre son utérus
- Teinture Chardon-Marie : Pour protéger son foie de l’impact des hormones de synthèse
- Composé de Complexe B et Rhodiola: Pour lui donner à la fois de la Rhodiola, une plante adaptogène qui lui permettrait d’avoir accès à de l’énergie pour terminer son marathon et de soutenir son système endocrinien, et un complexe B, pour stabiliser le système nerveux et diminuer la nervosité
- Une tisane quotidienne d’Avoine, Basilic Sacré, Achillée, Framboisier, Pissenlit et Camomille.
- Pour « obliger » son corps à s’endormir jusqu’à ce qu’elle se régularise :
- Composé de Houblon, Valériane et Passiflore et Mélatonine au besoin.
Je lui demande de lire mon article sur les perturbateurs endocriniens et de tenter le plus possible de les éliminer de son environnement, dans sa cuisine, ses cosmétiques, ses produits nettoyants, en plus d’augmenter la prise de brassicacées ( pour les composés sulfurés qui aident à la conversion des oestrogènes) et d’augmenter la prise d’eau. Après un mois et demi, son stress a diminué, elle dort mieux et plus, se sent plus stable et relax. Après le retrait de son implant, elle prend :
- Vitex, Pissenlit et un supplément contenant des composés sulfurés, pour faciliter l’élimination des xéno-oestrogènes et soutenir le système endocrinien
- Igname sauvage et Pimbina, pour leur action anti-spasmodique et anti-inflammatoire sur l’utérus.
Dans le mois qui suit, elle a ses menstruations, qui ne sont pas très douloureuses. Elle a commencé une cure de sommeil et ça lui fait beaucoup de bien. Un mois plus tard, elle a ses règles sans aucune douleur et des saignements normaux. Son sommeil est profond, elle n’a plus d’insomnie. Elle a repris le sport. Elle ne prend plus de complexe B sauf au besoin, mais sent une fatigue de fond. Comme prévu dans mon plan de traitement, je lui suggère de la Schisandra, une plante adaptogène qui soutient le foie, aide à la conversion des oestrogènes et redonne de la vitalité. En trois mois, la transition s’est faite en douceur et Helena a confiance qu’il est possible de vivre ses menstruations sans souffrir.
Lucie
Lucie était venue me voir en 2014 pour un fibrome. Avec un traitement de quelques mois, les symptômes avaient diminué et son fibrome également. Elle avait pris les teintures pendant un an, puis cessé. Un an et demi après, elle fait une crise de menstruations douloureuses et des crises d’anxiété. Elle quitte son emploi en « burn-out » et a finalement un diagnostic d’endométriose. Son cycle est plus court, son flux plus abondant. Elle revient me voir en 2017, après avoir ré-arrêté le gluten et la viande rouge. Je lui suggère :
- Composé 1 (Vitex, Achillée, Basilic sacré) Jour 1 à 14
- Composé 2 (Igname, Pimbina, Vitex, Achillée, Basilic Sacré) Jour 14 à 18
- Tisane quotidienne : Avoine, Framboisier, Achillée, Alchémille, Stellaire, Rose et, Calendule.
- Un Complexe B/Rhodiola : pour stabiliser son système nerveux et lui donner un souffle d’énergie pour la soutenir, ainsi que « se saouler » de tisane de framboisier pendant ses menstruations.
Dans les mois qui suivent, je vais lui conseiller, en plus des lectures et des ressources externes, du pissenlit et le composé Estro-Adapt pour la détox des oestrogènes, des méditations en lien avec son utérus, des « Yoni bath » d’Angélique, gingembre et cannelle, des bouillottes sous les reins et au fil des mois, changer ses formules pour mettre dedans Rehmania, Corydalis, Pivoine blanche, Millepertuis.
Les conditions vécues dans son nouveau milieu de travail sont encore difficiles et lui créent beaucoup de stress. Ainsi, l’évolution de sa santé depuis six mois n’est pas stable (d’où l’importance des facteurs psychosociaux !). Ceci dit, ses crampes sont maintenant inexistantes ou diminuées, elle n’a plus de symptômes prémenstruels, son flot est régulier sans spotting et sa digestion s’est stabilisée. Elle fait des démarches pour se réorienter et en attendant, apprend l’auto-reconnaissance dans son milieu actuel de travail C’est une démarche « work in progress », qui se doit d’être continuée pour arriver à encore plus de confort dans son utérus.
En conclusion, ces deux cas démontrent l’importance des conditions psychosociales et l’impact du stress sur la santé gynécologique, et donnent espoir qu’il est possible pour les femmes aux prises avec des règles douloureuses et/ou hémorragiques de retrouver des menstruations régulières et même agréables. Avec les années, j’ai noté que la plupart des femmes souffrant d’endométriose qui sont venues me consulter vivaient des situations relationnelles stressantes, souvent dans leur milieu de travail, dans lesquelles leurs besoins de reconnaissance, valeur personnelle et/ou créativité n’étaient pas comblés. C’est là qu’on réalise toute la valeur d’un accompagnement holistique !
Bibliographie
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Wang, L., Zhang, Y., Wang, Z., Gong, N., Kweon, T. D., Vo, B., … Civelli, O. (2016). The Antinociceptive Properties of the Corydalis yanhusuo Extract. PLoS ONE, 11(9), e0162875. http://doi.org/10.1371/journal.pone.0162875
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